Brom était chargé d'enquêter sur la soi-disant disparition de vivres, de nourriture. Leurs camp était en lisière de la forêt, le mage blanc s'enfonça dans son territoire naturel. Il y eut une bourrasque, la nuit venait de tomber, c'était le crépuscule, cet instant magique entre le jour et la nuit où tout est possible.

Il lui sembla voir une traînée noire, tout juste visible à l’œil nu, passer derrière un arbre. Brom alla voir de quoi il en retournait. La chose avait disparu. Puis dans son dos à gauche il vu la même forme de déplacement. C'était... rapide... Qu'est ce que c'était ? Est-ce que ça se mangeait ?Mais oui, une ombre ! Il en avait déjà entendu parler, c'était une légende urbaine, mais il ne voyait que ça.

Et ça ne se mangeait pas.

« Montre-toi, Ombre. Rend les vivres que tu as volé ! Nous serons peut-être cléments et essayeront de te nourrir, si le chef Grimr est d'accord. Je plaiderais ta cause mais ne m'ignore pas !

Je suis peut-être qu'un vieux lycan mais je t'ai bien cernée, Ombre... »

Brom s’assit sur une souche, croisa les bras et patienta, il guettait les mouvements rapides et cachés de l'ombre, qui consciemment ou non semblait le narguer. Les ombres étaient timides et réservées, ce n'est qu'en faisait qu'un avec la nature que Brom aurait la chance de la voir approcher.

Il ignorait si elle avait déjà mangée la nourriture. Ou alors peut-être qu'il se gourait totalement de piste et que ce n'était pas elle la voleuse, m'enfin elle était sa seule et unique suspecte pour l'instant. Brom l'appela une dernière fois et se mit en position du lotus en méditation.

Quelque chose le tira de sa transe.

La méditation avait portée ses fruits, rien ne sert de courir, il faut partir à point. Si Brom l'avait poursuivi, elle aurait sans doute fuie. Se mettre en position d’accueil et attendre patiemment, voilà la solution...

Brom sentit un visage presque collé au sien, il eut un petite sursaut en arrière.

« Qu’est-ce que des “vivres” ? »

Ah... Semblait qu'elle ne soit pas très ancienne... Peut-être avait elle vu le jour il y a seulement peu de temps. Apparemment... Elle n'avait pas besoin de se sustenter ?

« Les vivres ? C'est de la nourriture, la plupart des gens en ont besoin pour vivre. Tu n'as rien volé alors ? Est-ce que tu as vu quelqu'un partir avec un gros sac ? »

Brom l'observa, la petite silhouette noire, sans nez, la robe toute aussi noire, et contrastant totalement avec ça, la chevelure blanche et les yeux blancs sans pupilles. C'était la première fois que Brom voyait une Ombre.

« Qu'est ce que tu fais ici alors ? Tu nous observais ? Si tu es jeune tu dois avoir un millier de questions... Vas-y poses-les j'essayerais d'y répondre. »

Il se mit en position assise sur la souche et la regarda avec un air presque larmoyant, d'où venait cette subite émotivité ? Il avait envie d'entendre l'histoire de la silhouette ténébreuse, et il ne voulait pas lui faire peur.

« Ah au fait je m'appelle Brom White-Dawn, et toi ?! »

Il prit un quignon de pain dans son sac et lui dit « Tu n'en manges pas ? » puis devant la tête de l'Ombre, il croqua dans le morceau de pain. « J'veux dire, t'es pas obligée de manger pour survivre, mais est-ce que tu peux le faire pour le plaisir ? C'est que je suis pas idiot je vois bien que tu n'as pas de bouche, cependant peut-être que ça s'ouvre je-ne-sais comment.

Enfin, ça en fera plus pour moi... »

Elle répondait avec des gestes de la tête, c'était juste trop mignon. En plus elle était si petite, frêle et fragile... Mais peut-être avait-elle un talent caché qui puisse l’impressionner ?

Ainsi donc elle s'appelait Ombrane, voilà quelque chose qu'elle ne pouvait pas indiquer d'un mouvement de tête. Très bien, Ombrane, alors, ce qui était toutefois assez porche de « Ombre ».

Oh voilà qu'il apprenait qu'elle avait des dents ! Brom avait trouvé un sujet d'études passionnant. Il lui demanda : « Tu veux essayer de manger ? Enfin peut-être ne faut-il jamais commencer, car ça peut être dur de s'arrêter, comme une drogue en quelque sorte, mais nous les hominidés ne pouvons vivre sans...»

La petite ombre lui indiqua l'ouest, c'était de là qu'elle venait, donc peut-être que le voleur avait pris une autre direction, pourquoi pas...

« Bah ce n'est qu'un peu de nourriture... Mes sbires vont faire la sale boulot. On attend qu'il revienne, on lui tend un piège et hop, l'affaire est dans le sac.»

Ombrane aimait prendre son temps pour parler, ce que Brom trouvait sympa et agréable, elle ne jacassait pas comme lui-même le faisait parfois. Puis elle lui posa une question profonde « Qu'est ce que tu es ?» à laquelle l'orateur s'empressa de répondre.

« Je suis... Un être vivant... Je suis... de chair et de sang... Je suis amour, puisque l'amour est tout. J'appartiens à la race des Lycanthropes et ma faction est le Dangshuan. Je suis conteur, philosophe, guerrier, mage blanc, je soigne les gens... Je combat le mal... Je suis amoureux... D'une jeune fille qui s'appelle Signe. »

Il posa les deux poings sur ses hanches et lui retourna la question :
« Et toi, qu'est ce que tu es, Ombrane? »

La nourriture ne semblait pas la tenter, en particulier celle qu'il mangeait.

Depuis que Brom avait rencontré Ombrane, il s'était entièrement focalisé sur elle, oubliant le vol de nourriture.

La réponse à son « Qu'est ce que tu es ? » sembla la combler, ce n'est pas tout les jours qu'on tombe sur un vieux lycan qui sait si bien manier les mots.

Ombrane s’assied par terre et ses pieds fantomatiques traversèrent la souche.

Elle lui avoua ne pas savoir si elle existait réellement.

« Mais si, tu es là, tu me parle, d'être à être. Crois-moi si tu n'existais pas on ne pourrait pas avoir cette discussion... 

Bien l'amour c'est quand tu tiens très fort à quelqu'un et que tu tuerais pour la protéger... C'est un sentiment qui fait battre ton cœur et créé une jalousie, on a envie de l'autre. Bien souvent cela inclus du sexe. »

Elle lui fit son petit tour de magie, Brom la remercia.

« Oui le chevalier a pris le risque de combattre le dragon alors qu'il était très fort, car il aimait la princesse... Tu vois, l'amour nous pousse à faire des choses déraisonnables. 

Bon puisque tu m'as parlé à découvert, tu veux voir l'autre moi ?»

Sans attendre sa réponse il la considéra comme un « oui. » Et lui dit de ne pas avoir peur.

Son museau poussa vers l'avant, une belle gueule pleine de dents. De la fourrure blanche toute douce, des biceps et des mollets qui avaient doublés de volume, la cage thoracique et le cœur qui s'étaient nettement agrandi. Tout son corps, plus grand, plus musclé. Sa voix... La même... Douce et suave... Mais un brin plus grave quand même.

« Voilà je t'avais dis que j'étais un loup-garou, tu peux toucher ma fourrure si tu veux. Signe adore ça, ça la rend dingue. »

La petite ombre ne semblait pas avoir peur du puissant loup-garou. Elle se mit même à caresser sa fourrure affectueusement. Tout le monde aimait la fourrure de Brom.

« C'est quoi Signe ? »

« Oh... On ne dit pas « quoi » mais « qui ». Signe, c'est mon amante, la femme que j'aime, est-ce que tu peux comprendre ?! »

Avec un sourire amical, pour lui signifier qu'il ne la prenait pas pour une débile.

« Est-ce qu’une chose peut réellement exister si elle ne peut exister par elle-même ? »

La elle lui posait une colle ! Mais bon ! Défi philosophique accepté !

« Hmm... Je pense sincèrement que la dépendance, bien qu'elle soit une condition à l’existence, n'impacte pas l'existence en elle-même. Peu importe qu'il y ai une cause où non, l'existence est là. Et si l'origine de l'existence disparaît et bien hmm... Je suppose que c'est comme quand tu coupe un arbre, les feuilles meurent avec... »

Ils furent rattrapés par deux membres du Grand Silice armés de torches.

« Qu'est ce que tu fais Bromy ?! C'est la voleuse de nourriture ? »

« Euh non... Pas vraiment... Allez plutôt voir par là bas, je suis en train de faire connaissance avec une Ombre. »

« Ah euh... Mais nous, on peut être de la partie aussi ? »

« Non. Elle n'aime pas la foule. J'ai déjà eu du mal à entrer en contact, vous allez tout gâcher. »

« Très bien, on s'en va, mais on va faire TON boulot... »

Brom ne releva pas. Il savait qu'ils avaient des mots moins tendres dans leur tête mais comme il était le futur chef du Grand Silice par union, ils se la fermaient.

« Pardonne cette interruption, chère Ombrane. Ne t'inquiète pas, je suis sûr que tu existe, même si ton existence est conditionné par un tiers. Tu sais ce qu'on dit, il suffit qu'une personne nous aime pour se sentir exister. Tu ne l'a pas encore trouvée voilà tout. »

Alors, il y avait quoi... Un ragoût de lapin, il pouvait aisément pister cette odeur. C'était la dernière chose qu'ils avaient chipés.

Lauroy n'était pas un voleur expérimenté, mais il avait eu une sale enfance et n'avait pu apprendre aucun métier. Il venait de perdre ses parents et ne savait pas comment se nourrir, c'est ce qu'il déclara à Brom quand il le trouva. Grand seigneur, celui ci lui laissa les vivres qu'il avait volé, il n'attribua aucune punition.

"Je passe l'éponge pour cette fois mais que ça ne devienne pas une habitude. Ma magnitude est une exception au vol. Orphelin ou pas, il est mal de voler. Tu aurais dû demander l'aumone."

Il se tourna vers Ombrane, celle-ci ne semblait pas comprendre sa magninimité aussi expliqua il qu'il paierait de sa poche ce que Lauroy avait volé, ça avait été un peu comme s'il avait fait l'aumône au final.

Il y avait une question que Brom brûlait de lui poser.

"Tu veux visiter le Grand Silice, Ombrane?!"

Puis regardant le ciel, se repérant par rapport à la position des astres, il en déduit qu'il devait être tard, le lendemain matin il avait rendez-vous à l'école de magie, il fallait qu'il se mette en chemin.

"Hmm, enfin, pas ce soir, j'ai une course à faire chère Ombrane... Mais si on se revoit..."

Il cogna son poing sur le sien en signe d'amitié.

"Allez j'ai la route à faire! Je fus ravis de te rencontrer, ma belle. Cherche cette personne spéciale qui te fera te sentir vivant... Mais attention, c'est une recherche qui dure parfois des années ! Je sais de quoi je parles!"

Cette rencontre avait été magique. Brom espérait sincèrement la revoir.